Une histoire d'ours d'Eowyn Ivey (2025)

Ce long roman, où la lenteur du temps qui passe est un personnage à part entière, est composé de trois parties. Dans la première, l'auteur installe la routine délétère qui fait le quotidien de Birdie, la mère, et Emaleen, sa fillette de 6 ans au Wolverine lodge et rencontre avec le personnage d'Arthur. La deuxième partie met en scène le rude quotidien de Birdie et d'Emaleen sur le territoire d'Arthur, jusqu'à ce que l'inévitable, attendu et redouté, se produise. Enfin la troisième partie, en forme d'épilogue, est un retour sur les lieux où se sont déroulés les deux premières parties ; véritable catharsis, non sans risque, pour l'une et terrible expiation pour l'autre embastillé à vie derrière sa clôture électrique.


Dès le début l'auteur distille subtilement de petits éléments qui mettent la puce à l'oreille du lecteur sans qu'il soit encore en capacité d'en mesurer la portée, puis la menace monte en puissance et lorsqu'elle est avérée, l'amour entre Birdie et Arthur a déjà faussé la donne, les dés sont jetés.

Cette histoire qui mêle hyperréalisme et fantastique, n'est pas sans évoquer le célèbre Docteur Jekyll et Mister Hyde de Robert-Louis Stevenson, cet être double dont les deux parties qui le composent sont totalement cloisonnées bien que confusément conscientes l'une de l'autre.

Mais au final, comment ne pas penser à ces hommes qui, sous emprise, battent comme plâtre leur compagne avant de redevenir d'adorables partenaires attentionnés comme si de rien n'était et à ces femmes qui, convaincues de pouvoir aider leur homme, de pouvoir le changer, y retournent jusqu'à se brûler les ailes, voire pire ?

Comme dans L'enfant de neige (2012), l'écriture est magnifique, l'auteur décrit les lieux avec précision et force détails, immergeant le lecteur dans cette merveilleuse - et terriblement hostile pour l'homme - nature alaskienne.

Pour finir, pourquoi le titre choisi par l'auteur Bois noirs, ciel bleu a-t-il été traduit par Une histoire d'ours  ? La traduction justement est parfois limite avec des tournures bizarroïdes, comme si elles étaient directement transcrites de l'américain : 

  • « Elle et Della tracèrent... » ou encore 
  • «  elle et Emaleen se réveilleraient... »

Enfin, esprits cartésiens passez votre chemin, cette histoire, solidement ancrée dans la réalité des montagnes alaskiennes est indéniablement fantastique, un peu comme le sont les Fables de la Fontaine... avec une sorte de morale à la fin.

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